8.12.11

Un hiver à Majorque (George Sand, 1855)

Récit d´un voyage que George Sand fit en 1838 avec le compositeur Frédéric Chopin.

En cet hiver de 1838, Georges Sand s´était liée depuis peu avec Chopin. La santé de ce dernier étant chancelante, la romancière décida de passer l´hiver dans l´île de Majorque, dont on lui avait récemment vanté la témperature clémente.

Les majorquins étaient sous le joug des espagnols qui leur soutiraient toutes leurs richesses et les empêchaient de faire du commerce. Voyant que le fruit de leur travail leur était dérobé, les majorquins se laissaient vivre et se démenaient le moins possible. Ils devinrent sauvages et hostiles à tous les étrangers. Puis les Espagnols consentirent à ce qu´ils fassent le commerce du cochon. L´animal devint l´objet de toutes les attentions des majorquins. C´est à la suite de cette ouverture que George Sand devint la première touriste des Baléares!

Au grand désespoir de son éditeur François Buloz, elle n´accepta de relater son voyage que trois ans après son retour, car elle était très choquée par l´accueil que lui avaient réservé les Majorquins et il lui répugnait de trop médire d´eux. Cependant le sentiment de l´humiliation était encore vivace trois ans plus tard.

Les ennuis commencèrent dès le voyage en bateau, où l´équipage s´intéressait plus à sa cargaison de cochons qu´au confort de ses passagers. À Palma, George Sand et sa petite famille eurent de grandes difficultés à trouver un logement car la ville était envahie par une horde de soldats espagnols. De plus, l´aspect souffreteux de Frédéric Chopin rebutait les éventuels logeurs. Ils soupçonnaient d´être phtisique (tuberculeux) et ils pensaient que cette maladie était contagieuse. George Sand en gut révoltée car, pour elle, Chopin ne souffrait que d´une laryngite. D´autre part, l´aspect contagieux de la tuberculose ne fut démontré qu´en 1865, par Villemin.

Un propiétaire accepta enfin de prêter une maison aux voyageurs. Tour s´y passa bien tant qu´il fit beau. Ils visitérent les beaux monuments de la ville de Palma. Les ruines d´un monastère de l´Inquisition amenèrent une réflexion à Geroge Sand: faut-il regretter les beautés architecturales d´un monument symbole d´une dictature ou est-il préférable de se réjouir de sa destruction et de la libération des êtres qui y étaient détenus?

Brutalement, le temps devint maussade et comme certaines parties de la maison n´avaient pas de fenêtres, la santé de Chopin se détériora. Les locataires furent sommés de quitter les lieux, de tout nettoyer et d´acheter tous les objets qu´ils avaient utilisés. Par bonheur, un logement se libéra à l´intérieur de l´île, dans la Chartreuse de Valldemosa, mais le chemin escarpé qui y menait était très dangereux. La Chartreuse était située dans un lieu enchanteur. Le paysage était sauvage et de particulièrement inamical. George Sand pensait qu´ils étaient affectés par leur environnement.

À la Chartreuse, les voyageurs furent accueillis par une certaine Maria-Antonia qui s´empressa de leur prêter des utensiles de cuisine. Mais dès qu´ils eurent fait à manger, Maria-Antonia dévora dans leurs plats. Ces emprunts de nourritures, drôles au début, devinrent vite gênants quand les vivres vinrent à manquer. En effet, les paysans rechignaient à leur vendre de la nourriture et leur demandaient toujours des prix exorbitants. Ne pouvoir alimenter Chopin correctement, alors qu´il était malade, devint una angoisse permanente pour George Sand.

La visite de la Chartreuse, qui était une immense bâtisse, fit réfléchir la romancière sur ce qu´était devenue la vie monastique à travers les âges: les voeux de pauvreté et de tempérance des origines s´étaient transformés en paresse et en gourmandise. Dans son roman "Spiridon", que George Sand écrivit en partie à Majorque, elle évoque ce problème. L´oeuvre est aussi imprégnée des délires fantastiques que provoqua la beauté sauvage de l´île de Majorque dans l´esprit de la romancière.

La seule habitante de l´île qui laissa un bon souvenir à George Sand était une jeune fille de seize ans nommée Perica. En la rencontrant au détour d´un chemin, la romancière la prit pour une fée. Perica la conduisit dans un lieu magique qui surplombait la mer. George Sand s´y sentit pousser des ailes et manqua de mettre sa vie en danger à la grande frayeur de ses enfants.

Dès que le temps s´améliora, les voyageurs s´empressèrent de quiter l´île malgré le très mauvais état de santé de Chopin. Sur le bateau français qui les reconduisait vers leur pays, George Sand et sa famille furent touchées par l´accueil amical et attentionné de l´équipage et se sentirent déjà chez eux.

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